Hier, le 8 mai, je trie les photos et les divers papiers d’Huguette, 95 ans, en vue d’illustrer son récit de vie.
Mes doigts parcourent les piles de photos, feuillettent les documents. Je marque une pause. J’ai entre les mains la carte d’identité d’Huguette, celle délivrée le 10 mai 1943 par la police d’Etat de Seine-et-Oise, il y a presque 76 ans, jour pour jour. La petite histoire me ramène ainsi opportunément à la grande… Un hasard ou une résurgence du passé ?

Ne sommes-nous pas le 8 mai ?

Je poursuis ma quête, au hasard. Je tiens maintenant le laissez-passer de nuit de Marguerite, la mère d’Huguette, infirmière, qui dispose d’un Ausweis émis par la ReisKommandantur N°780. Au fil des six renouvellements successifs, entre décembre 1940 et décembre 1942, il a été recouvert de cachets ; ceux du IIIème Reich nazi où trône la croix gammée surmontée de l’aigle royal. Six passages auprès des autorités allemandes, six moments sans doute empreints de tension.

Elle possède également une autorisation de l’administrateur provisoire de sa commune. C’est un petit bout de carton bleu clair au dos duquel le laissez-passer a été recopié en allemand. On lit encore facilement les mots tracés avec application à la plume et à l’encre noire « Frau Michaut Marguerite ist berechtigt nachts auf den strassen… ».

• Deux documents qu’elle portait sur elle ou dans son sac et présentait régulièrement.

• Deux documents chargés d’émotions qu’elle a gardés et transmis à sa fille.

• Deux documents manipulés par ses doigts, par les miens aujourd’hui.

Un morceau d’Histoire tangible, qu’on touche du doigt, qu’on effleure, juste là.

Il retrouvera ensuite sa place dans sa boîte mais aussi dans le livre qui raconte l’histoire d’Huguette.